Prix de l'Académie du Berry 2018
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Présentation de Francesca et Lucien Lacour
lors de la remise du prix 2018 de l’Académie du Berry,
le 13 octobre 2018, à Châteauroux,
par Catherine Réault-Crosnier, Présidente du prix de l’Académie du Berry
Mme Francesca Lacour et M. Lucien Lacour reçoivent ce jour, le prix de l’Académie du Berry 2018, pour leur livre sur Ernest Nivet (1871-1948) – Vie et destinée d’un praticien de Rodin.
Mme Francesca Lacour, présidente des « Amis d’Ernest Nivet », est archiviste paléographe c’est-à-dire diplômée de l’École nationale des chartes, grand établissement d’école supérieure à la pointe des recherches historiques situé à Paris, à côté de la Bibliothèque nationale de France, de l’École du Louvre, du ministère de la Culture. Chevalier des Arts et Lettres, elle a reçu le prix Guy Vanhor-Ville de Châteauroux, pour son ouvrage Les fils de Saint-François en Berrypublié en 1972.Elle est aussi la petite-fille du sculpteur Ernest Nivet. Même si elle ne l’a pas connu de son vivant, elle est imprégnée de son œuvre depuis son enfance car elle a vécu dans sa maison familiale, et de sa vie par les paroles de son entourage et de ses amis.
Son mari, M. Lucien Lacour, agrégé de l’Université, officier dans l’ordre des Palmes académiques, a enseigné les lettres classiques (français, latin, grec) ainsi que l’histoire des arts (au cours de ses dernières années d’activité). Ensemble, ils ont publié de nombreux articles sur Ernest Nivet.
Tous deux ont participé au documentaire « D’âmes et de pierre », réalisé par Pascal Guilly (co-produit par Tga production et France 3 Centre-Val de Loire avec le soutien du CICLIC), pour retracerl’itinéraire de ce sculpteur, fils de paysans, qui a réussi à devenir praticien chez Rodin où il a travaillé, entre autres, sur « Les bourgeois de Calais » ou le « Balzac».Ce film a été diffusé en 2016, à la télévision, sur France 3 Centre-Val de Loire, au cinéma Apollo à Châteauroux, et en DVD.
Depuis trois ans, en vue de l’édition d’un livre sur Ernest Nivet, M. et Mme Lacour ont cherché un éditeur, corrigé les épreuves et réuni les illustrations mais leur travail préparatoire et leurs recherches avec dépouillement de documents inédits et leurs classements, s’étalent sur plus de dix ans. Leur travail est immense. Ils auraient pu encore continuer mais ils ont préféré s’arrêter pour une publication à l’occasion des soixante dix ans de la mort du sculpteur.
En avril 2018, pour le soixante-dixième anniversaire de la mort de ce sculpteur, ils ont fait paraître Ernest Nivet (1871-1948) – Vie et destinée d’un praticien de Rodin, aux éditions Lucien Souny. Dans ce livre de 404 pages, vous trouverez une mine de renseignements précieux sur sa biographie et sur son cheminement artistique tout au long de sa carrière ; vous admirerez la richesse de la documentation, l’abord agréable en même temps que très détaillé, traduisant la passion de création chez Ernest Nivet durant toute sa vie.
Vous approfondirez sa vie, son œuvre, sa volonté, sa force de caractère. Vous suivrez son chemin de vie, de la naissance de son goût artistique à sa passion totale pour l’art, de ses difficultés à en vivre, à être reconnu, à son refus de certaines commandes si elles ne correspondaient pas à sa démarche artistique. Il a toujours voulu rester lui-même, allant jusqu’à refuser certaines commandes même de personnes haut placées qui auraient pu le faire connaître.
Vous partirez avec lui, près des gens de son temps, de ses nombreux amis :
– Georges Lubin, ami de longue date qui a écrit le poème « Le poilu de Levroux » en l’honneur d’une sculpture d’Ernest Nivet (p. 16, p. 226) ;
– Fernand Maillaud et la famille Christoflour, grands amis et artistes (p. 153) ;
– Jacques des Gâchons, critique qui lui a rendu hommage (p. 128, p. 153) ;
– Maurice Brimbal qui a aidé à sa reconnaissance (p. 121, p. 154) ;
– Gabriel Nigond dont Ernest Nivet a réalisé une médaille à son effigie (p. 121, p. 154, p. 268) ;
– la famille Sand qui venait le voir chez lui et chez laquelle il était invité (p. 153, p. 251) ;
– Joseph Ageorges, journaliste et écrivain (p. 154),
– Hugues Lapaire, poète, romancier, conteur, critique littéraire et parrain de la deuxième fille de Nivet (p. 156, p. 157) ;
– Maurice Rollinat, dont il a réalisé une fine esquisse préparatoire (p. 251) ;
– Jacques de Vasson et sa fille artiste (p. 189) ;
– Guy Vanhor, poète, romancier, critique littéraire (p. 252) ;
– Charles Balsan, industriel, député de la 1èrecirconscription de l’Indre (p. 192) ;
– Joseph Pierre, le grand collectionneur et directeur de la Revue du Berry(p. 251) ;
– Raymonde Vincent, prix Fémina 1937 pour son roman Campagne(p 293) ;
– et d’une autre manière Saint François d’Assise dont il admirait la simplicité et la spiritualité (p. 256).
Les difficultés de sa vie, les tensions, ses heurts, ses choix font partie de la vie de ce sculpteur. Elles sont présentées ici telle sa rupture avec son maître, Rodin, pour travailler dans son pays natal, pour ne pas étouffer sa propre perception artistique, pour vivre uniquement de son élan artistique personnel, de sa force créatrice.
Ernest Nivet reçut une première récompense en 1906, pour sa sculpture « Le berger couché ». D’autres suivront dont, en 1923, une médaille d’or pour « La Paysanne » sur le monument aux morts de La Châtre, en 1937, le Grand Prix international de sculpture, reconnaissance officielle de son talent. Il sera nommé Chevalier de la Légion d’honneur en 1924.
L’impact de la guerre fut pour lui, la source de nombreuses commandes en Berry, tel le monument aux morts de Buzançais avec une femme éplorée, « Les Derniers Jours », tombe de la famille Nivet au cimetière de Châteauroux, le monumental monument aux morts d’Issoudun avec une femme tenant devant elle, le corps dénudé de son fils mort, « Le Poilu » pour le monument aux morts de Levroux, « Les Pleureuses », monument aux morts du département à Châteauroux… (cf. pages des photos) À chaque fois, nous sommes surpris par l’émotion dégagée par ces sculptures, expression de la douleur.
Mme Francesca Lacour et M. Lucien Lacour, vous avez su réaliser avec talent, la rétrospective de la vie d’Ernest Nivet, empli de passion artistique et d’une âme attentive aux plus petits dans la spontanéité de leurs vies de tous les jours. Vous avez su rendre hommage à cet artiste d’exception, ce sculpteur qui a su exprimer avec authenticité, l’âme du Berry.
Nous sommes heureux de vous remettre ce jour, le prix de l’Académie du Berry, pour votre travail de grande envergure qui met à l’honneur, Ernest Nivet, artiste qui mérite vraiment d’être réhabilité.
Catherine Réault-Crosnier.