Prix de l’Académie du Berry 2025
Remise du Prix de l'Académie par :
Mme Monique DELCLAUX
Présidente du Prix de l'Académie du Berry
à M. Jean-Pierre SURRAULT
" Pour sa trilogie "
Le Prix de l’Académie du Berry 2025 a été attribué à Jean-Pierre Surrault pour la trilogie qu’il a consacrée à des milieux sociaux du Bas-Berry et dont le dernier volume a été publié en 2024.
Jean-Pierre Surrault préside l’Académie du Centre depuis de nombreuses années. Cette
Société savante est la plus ancienne du département de l’Indre. Fondée en 1878, ses centres d’intérêts sont notamment l’archéologie, l’histoire, l’ethnologie… Elle organise environ 10 conférences par an et une sortie « foraine » au printemps qui permet de visiter des sites patrimoniaux. Une Revue, toujours très riche et savante, paraît chaque année en décembre et cela depuis 1936.
En tant que professeur agrégé d’histoire et docteur en histoire moderne de l’université de Tours, Jean Pierre Surrault a mené une double carrière celle d’enseignant et celle d’historien- chercheur. A ce titre il a conduit et dirigé de nombreux travaux principalement sur le Bas-Berry. Pour n’en citer que quelques-uns : en 2000 paraissait Au temps des Sociétés : confréries, bachelleries, fêtes, loges maçonniques en Bas-Berry, XVIIIe siècle qui reste un ouvrage de référence sur la sociabilité de l’époque. « Les temps modernes XVIe-XVIIIe siècles » dans l’ouvrage collectif sur l’Indre : le Bas-Berry de la préhistoire à nos jours (1990). Et plus récemment, en 2024, est paru « Magie et sorcellerie entre Gartempe et Creuse XVIe-début XXe siècles. Enfin il a codirigé avec Philippe Goldman et Xavier Laurent, le Berry de la Renaissance (2019) et Berry : mémoires, culture, lieux, identités (2023). Ce dernier ouvrage a été couronné par l’Académie du Berry.
Les trois recherches consacrées à des milieux sociaux du Bas-Berry ont été étudiées sur des temps longs, de la Renaissance à l’époque de Louis XIV pour le premier volume, et au long des XVIIIe et XIXe pour les deux autres.
Le premier ouvrage, paru en 2013, s’intéresse aux professions savantes. Il s’intitule « De père en Fils, médecins, apothicaires, avocats du Berry, de la Renaissance à Louis XIV ». (Lancosme, 192 pages) Il traite de la destinée des descendants de Jacques Bernard, marchand drapier à Saint-Benoît-du-Sault, petite ville prospère au XVIe siècle et qui se situe aux confins du Berry et du Poitou. Parmi les descendants de Jacques Bernard, plusieurs sont à l’origine de lignées d’apothicaires et de médecins, de père en fils sur plusieurs générations. Certains sont restés à Saint-Benoît, d’autres sont allés s’installer à Issoudun, à Bourges, à La Rochelle, à Rouen. A la troisième génération, quelques membres de ces familles, firent des carrières juridiques, avocat, notaire. Certains côtoyèrent des princes, ainsi Jean Bernard de la Baffarderie qui passa quelques années à la cour du prince d’Este à Ferrare et publia deux ouvrages en italien.
Le second ouvrage paru en 2017 s’intitule « Souvenirs de Madame Pierre Balsan (1810-1870), Naissance des établissements Balsan » (Lancosme, 255pages). Il retrace l’histoire de Pierre Balsan et d’Elodie Martin son épouse, couple d’industriels, fondateurs des établissements Balsan à Châteauroux. L’ouvrage s’organise autour d’un document d’une cinquantaine de pages, rédigé par Mme Balsan. Elle évoque l’histoire de sa famille, celle de son époux et la vie familiale de son couple jusqu’à la mort de Pierre en 1869. Ces « Souvenirs » font l’objet de la seconde partie de l’ouvrage et sont suivis de commentaires et d’éclairages de notre auteur. Dans la première partie, Jean-Pierre Surrault donne une biographie très fouillée des deux protagonistes, depuis leur enfance et adolescence dans le Languedoc dans des milieux de la petite bourgeoisie commerçante ou terrienne, puis de leur ascension sociale à Paris où Pierre, associé à son beau-père, fait fortune dans le commerce du drap avec l’armée, à qui il fournissait aussi tout l’équipement pour les chambrées des casernes par l’intermédiaire de sa société « les lits militaires ». La famille entre alors dans la bourgeoisie parisienne et dans sa frange la plus fortunée. Elle acquière des immeubles à Paris et à Neuilly. Enfin les Balsan s’installent à Châteauroux en 1856 quand Pierre Balsan rachète la manufacture de draps à Léonard Muret de Bort, passant ainsi du commerce à l’industrie. Il fait construire par l’architecte Alfred Dauvergne une usine fonctionnelle et techniquement très en avance pour l’époque, où travailleront plus de 1000 ouvriers. Après la mort de son mari en 1869, Elodie Balsan se révéle une femme d’affaire ayant le contrôle sur ce qui se passe à l’usine, mais s’engageant aussi dans la construction d’écoles, d’églises...
Cet ouvrage est maintenant introuvable en librairie.
Le troisième ouvrage, paru en 2024, traite de la condition ouvrière dans l’Indre au XVIIIe et début XIXe siècle. Il a un beau titre : Le Berry du fer et de la laine. Les premiers ouvriers de l’Indre vers 1750-vers1830 ( Lancosme, 204 pages) . L’étude porte sur deux univers ouvriers très différents mais qui ont participé pour une grande part à l’activité industrielle de l’Indre à cette époque : celui des forges, nombreuses dans le département et plutôt installées dans la campagne (à Ardentes, à Crozon-sur-Vauvre…), univers essentiellement masculin, et celui des manufactures textiles implantées le plus souvent en milieu urbain et employant majoritairement des femmes. Le cadre du travail et la vie des familles de ces deux univers sont décrits d’une manière très vivante avec leurs pratiques et conditions de vie spécifiques. Une attention particulière est portée au patrimoine bâti encore présent pour en souligner sa fragilité.
Cette étude a occupé son auteur pendant de nombreuses années.
Le point commun à ces trois ouvrages relève de la méthode à l’œuvre qui est une approche holistique du sujet, convoquant aussi bien l’histoire que la sociologie, l’ethnologie, l’économie …. Les pratiques professionnelles, l’environnement et les conditions de travail sont étudiés tout comme les modes de vie, la sociabilité, les pratiques culturelles ainsi que les mentalités et les valeurs des uns et des autres. Ces trois ouvrages reposent aussi sur un travail généalogique très précis qui est indispensable pour éclairer certains événements familiaux ou professionnels.
Enfin il faut souligner la qualité des illustrations, très nombreuses dans les trois ouvrages, toujours pertinentes, souvent inédites et qui viennent fort judicieusement compléter et éclairer l’écrit.